EDITORIAL 2nd SEMESTRE 2025

Lutter contre l’impalpable dépression institutionnelle

Sentez-vous cette lente mais inexorable vague dépressive qui court et s’étend comme un voile sur le toit des institutions publiques comme sur les entreprises privées ?  il y a comme un sentiment général d’impossibilité à faire face à la crise, une impression d’écrasement par les puissances d’argent, une vision d’impuissance devant les contraintes et les nuages qui s’accumulent.

C’est que le spectacle du monde n’est guère réjouissant. On n’en finit pas d’accumuler les constats alarmants, voire tragiques, sur tous les fronts : la défense de l’environnement bondit de défait en défaite, la démocratie n’est plus guère représentée parmi les Etats que par de rares exceptions, les guerres s’intensifient par la maladie du pouvoir, rien ne semble pouvoir arrêter les destructions humaines et matérielles, les dettes publiques enfoncent tous les pays tandis que les plus riches s’enrichissent encore et encore.. etc. La liste est loin d’être exhaustive.

Les répercussions de ces drames sur le quotidien et la vie des entreprises sont manifestes : contraintes aggravées de l’urgence et des normes, calculs à court-terme, baisse des moyens publics, effondrement du pouvoir d’achat, faiblesse des investissements, fragilisation des structures… A l’écoute des salariés, du monde du travail, on s’aperçoit que couve une sorte d’ambiance globale dépressive, formée d’inquiétudes sur l’avenir, de jugements négatifs sur les possibilités d’amélioration, de renoncement devant l’adversité. 

Or, disons-le : c’est bien dans l’esprit qu’a commencé depuis quelques temps la nouvelle guerre mondiale. En regardant en nous-mêmes, l’adversaire s’identifie tout de suite. Si on laisse un état d’esprit victimaire s’infiltrer dans nos consciences, le résultat ne peut être que l’intensification de l’obscurité sur tous les échelons sociaux.

Nous, dans le monde du travail, soutenons que les restrictions et l’adversité doivent nous inciter, tout en courbant le dos à relever la tête (même si la posture fait grincer au niveau des lombaires). Si ce n’est qu’un moment de l’époque, il ne doit pas anéantir nos projets, faire vaciller nos espérances. C’est peut-être même le meilleur moment pour intensifier notre créativité et cultiver notre discernement, au niveau personnel comme collectif, là où nous pouvons, comme nous pouvons. Les ressources internes sont illimitées, ne nous laissons pas rattraper par l’illusion du chaos externe. Des beaux exemples existent un peu partout, qu’il faut savoir relever.

Nous avons vu récemment des cas manifestes de résilience victorieuse : telle entreprise du social se voit refuser par les pouvoirs publics un investissement immobilier, elle la transforme avec un bailleur privé en ambitieux contrat locatif ; telle entreprise voit sa trésorerie fondre par le coût excessif des personnels de remplacement, elle crée en son sein une école de formation, dont une partie des stagiaires se fidélisent à son profit ; telle association a un projet environnemental original mais menacé par des coûts importants à supporter, elle fait appel à un financement participatif (crowdfunding) qui vient abonder son initiative etc.. Regardons autour de nous, et en nous, et nous trouverons de nombreux motifs de penser qu’en gardant l’esprit clair et bien orienté, nous trouverons les moyens de résister aux intempéries, à condition de conserver au cœur et dans la tête cette « espérance folle » que chantait Guy Béart.

Jean-Philippe TOUTUT        

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *